Impôt sur l’héritage : réforme nécessaire ou appât électoral ?

Publié le 24 Fév 2022

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Thématique : Actualités

Rédigé par Emilie Gardes

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Depuis décembre dernier, le projet de réformer les droits de succession et de donation électrise les débats entourant les élections présidentielles de mai 2022.

PODCAST #5 : Maître Céline Boyer, Notaire

Réforme sur les droits de succession et de donation : l’avis de l’expert

Céline Boyer - Notaire

horloge Durée Podcast 13:23 min.

Alors que plusieurs sujets brulants animent actuellement la campagne présidentielle, l’un d’entre eux s’est régulièrement invité sur le devant de la scène ces derniers mois : l’imposition sur les droits de succession et de donation. Un thème populaire, soulevé initialement par Valérie Pécresse, candidate plaidant pour une réforme allégeant fiscalement les héritiers. Par répercussion, ses concurrents politiques n’ont pas vacillé devant l’opportunité de se positionner, eux aussi, sur cette intention en révélant leurs propositions respectives. Toutes abondent dans un sens commun : rehausser les exonérations présentement offertes aux bénéficiaires.

Une refonte apparait-elle indispensable ?

Selon un rapport édité fin 2021 par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economiques), la France se classerait en 3ème position des pays dans le monde générant le plus de recettes fiscales de son système d’imposition sur les héritages. Un état de fait qui semble sous-entendre que les ayant-droits seraient très lourdement taxés sur le patrimoine qu’ils reçoivent. Or, si l’on regarde de plus près, les déductions règlementaires en vigueur permettent aujourd’hui à 80 % des héritiers dans l’Hexagone d’échapper à toute forme d’imposition dans le cadre d’une transmission.

En effet, pour rappel, les époux et conjoints de PACS sont exonérés de droits de succession. Les enfants (ligne directe) bénéficient, eux, d’un abattement de 100 000 € lors du décès de chacun des deux parents ou lorsque ces derniers réalisent une donation de leur vivant. Les ascendants profitent également d’un affranchissement de 100 000 €. Ce dernier s’abaisse à 15 932 € pour les frères ou sœurs, et à 7 967 € pour les neveux ou nièces. Quant aux petits-enfants, ils jouissent, pour leur part, d’une diminution bien plus faible de 1 594 €, équivalente à celle des arrières petits-enfants. Exception faite s’ils héritent à la place d’un parent décédé ou ayant refusé sa succession. L’exemption de 100 000 € s’applique alors, ou se divise en parts égales dans les cas de fratrie. Enfin, les personnes handicapées sont distinguées d’un coup de pouce spécifique, correspondant à un dégrèvement de 159 325 €. Il s’ajoute aux exonérations habituelles incombant au lien de parenté.

Peut-on alors ainsi songer qu’une refonte de la fiscalité des droits de succession et de donation apparaisse aujourd’hui réellement indispensable ? « C’est un thème qui est récurrent, à chaque élection présidentielle, nous avons des effets d’annonce car c’est un sujet particulièrement sensible qui touche beaucoup de Français, » observe la notaire Céline Boyer. « On remarquera d’ailleurs qu’à chaque fois qu’il y a eu de grandes réformes en la matière, elles ont justement suivi les élections présidentielles« , ajoute-t-elle. La professionnelle se souvient des quinquennats de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande qui ont entrainé respectivement un adoucissement puis un alourdissement des droits de succession. « C’est un sujet qui revient toujours sur la table à ce moment-là » et qui a pour effet de « susciter les passions dans les débats télévisés et à la radio« , remarque la professionnelle. A l’image, donc, de ce que le jeu électoral implique.

La fiscalité, garante d’égalité ?

Une refonte de l’imposition sur la transmission, dans le sens souhaité par la majorité des candidats aux élections présidentielles, permettrait d’exonérer jusqu’à 90 % des bénéficiaires contre 80 % actuellement. Ainsi, seulement 10 % des héritiers en France se verraient encore contraints d’assumer les droits de succession et de donation. Un postulat qui irait à contre courant des recommandations émises par l’OCDE dans son rapport. La haute institution rappelle qu’une fiscalité équitable possède un double avantage capital pour une nation : elle soigne les caisses de l’Etat à l’heure où les conséquences économiques de la Covid 19 vont commencer à dangereusement se faire ressentir sur les deniers publics – en conséquence des dispositifs massifs d’aide et de soutien, et possède pour effet vertueux de garantir une certaine égalité sociale entre les individus. La fiscale successorale et ses mouvements représentent « surtout une question philosophique qui renvoie à l’égalité des chances« , admet Maître Céline Boyer. « Beaucoup de personnes souhaitent et envisagent de transmettre à leurs enfants, c’est un peu le but d’une vie. Mais en même temps, nous sommes dans un pacte républicain égalité-liberté-fraternité. L’égalité, ne passe-t-elle pas justement par une imposition des droits de succession, puisque les inégalités se reproduisent déjà beaucoup par rapport aux différents patrimoines que l’on peut recevoir ? » questionne-t-elle.

La transmission, un sujet à considérer au plus tôt

Pour pouvoir légitimement bénéficier des meilleurs systèmes fiscaux en vigueur sur la transmission de patrimoine, Maître Céline Boyer préconise de s’intéresser au plus tôt à la succession que tout un chacun va souhaiter mettre en place. « Il n’y a pas d’âge minimal ou du moins d’âge-clé pour anticiper au mieux, c’est du cas par cas« , explique la professionnelle. « Evidemment, le point de départ, c’est le patrimoine. Si l’on en possède pas, il n’y a pas vraiment de sujet. On va vraiment commencer à se poser des questions lorsque l’on achète ou hérite d’un premier bien immobilier« .

Parmi les actifs les plus adaptés à faire rentrer dans une succession en termes d’imposition attractive, Maître Céline Boyer pointe du doigt sans hésitation l’assurance-vie. « Ce n’est plus un secret aujourd’hui. Le produit permet du vivant de capitaliser, et en cas de décès de transmettre avec une fiscalité favorable. La taxation étant différente en fonction de l’âge de versement des primes puisque l’on a une date couperet à 70 ans pour l’assurance-vie. Avec une fiscalité très intéressante avant 70 ans. C’est un actif souvent plébiscité par les clients. Il permet une certaine flexibilité et une optimisation fiscale à terme par des clauses bénéficiaires bien rédigées « , achève-t-elle.

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Emilie Gardes

Rédactrice spécialisée en Economie, Finance et Immobilier

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