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Réforme des retraites : pourquoi les régimes spéciaux pilotent les grèves ?

Publié le 10 Fév 2023

horloge Lecture de 5 min.

Rédigé par Emilie Gardes

Thématique : Actualités

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Une nouvelle manifestation nationale a pris d’assaut les rues françaises le mardi 7 février pour s’opposer à la réforme des retraites 2023. En tête des cortèges : les syndicats de la RATP, de la SNCF, d’EDF, de TotalEnergies, et de la fonction publique. Ces débrayeurs qui parlent au nom de toute la population active du pays la représentent-ils vraiment ? Pas exactement. Ces grévistes de première ligne sont en grande majorité issus des régimes spéciaux que l’Exécutif souhaite abolir.

Fin des régimes spéciaux : une mesure d’équité ?

Le 10 janvier dernier, Élisabeth Borne présentait le projet de réforme des retraites de son gouvernement. La Première ministre a détaillé ses grands axes parmi lesquels le recul de l’âge légal de départ à la retraite, l’allongement de la durée de cotisation pour la retraite à taux plein, la fixation d’une pension minimale de 1 200€ et … la suppression des fameux régimes spéciaux.

« Nous allons fermer la plupart des régimes spéciaux de retraite existants. Ces régimes ne sont plus justifiés aux yeux des Français et les âges dérogatoires de départ, 52 ans ou 57 ans, ne sont plus adaptés à la réalité de ces métiers. Ces régimes rendent le système de retraite peu lisible, complexe et parfois injuste aux yeux des assurés »

Discours d’Elisabeth Borne, le 10 janvier 2023.

Selon l’Exécutif, il convient d’éviter de glisser vers un système de retraite trop déficitaire. Or, ces mécanismes privilégiés sont jugés non équitables et surtout trop coûteux. Bénéficiant d’un départ en retraite anticipée, ces affiliés perçoivent leurs pensions de retraite sur une durée plus longue. En outre, les montants de ces pensions spécifiques sont également, en moyenne, plus élevés en raison des avantages offerts par chaque régime spécial.

Régimes spéciaux : qu’est-ce que c’est ?

La Sécurité sociale et le régime général ont été créés en 1945, au sortir de la seconde guerre mondiale. À cette époque, quelques branches professionnelles avaient déjà pris les devants en concevant un système de protection sociale indépendant pour leurs collaborateurs. Lorsqu’il leur a été proposé de rejoindre le régime général, ils ont préféré refuser par crainte d’être moins bien pris en charge. Ainsi, par opposition au dispositif commun, c’est tout naturellement que ces systèmes se sont baptisés régimes « spéciaux ».

Après en avoir recensé près d’une centaine il y a 70 ans, la France ne compte plus à ce jour qu’une dizaine de régimes spéciaux. Les plus connus sont ceux de la RATP, de la SNCF et de la branche IEG (industries électriques et gazières) rassemblant EDF, Enedis, Engie et RTE pour ne citer qu’eux. S’ajoutent également les régimes de la Banque de France, les clercs de notaires, la Comédie Française, les marins, les ministres des cultes, les mineurs, l’Opéra de Paris ou encore le Port autonome de Strasbourg. Selon la Sécurité sociale, ces régimes spéciaux comptabiliseraient aujourd’hui 7 % des travailleurs français.

Des droits retraite plus avantageux

Sur le pan des droits retraite, ces systèmes spéciaux profitent traditionnellement de dispositions plus favorables que celles offertes dans le régime général. A titre d’exemple, le calcul du montant de la pension de retraite peut y être apprécié sur les 6 derniers mois de carrière. À la différence, les salariés du privé sont considérés sur leurs 25 meilleures années.

Autre très grand attrait des régimes spéciaux : pour cause de pénibilité, les affiliés pratiquant certains métiers sont récompensés d’un départ en retraite anticipé. Ils peuvent ainsi partir entre 52 ans et 57 ans. Dans la réalité des faits, quasiment l’intégralité de ces travailleurs partent donc bien plus tôt en retraite que les 62 ans actuellement inscrits dans la loi.

À quel âge les régimes spéciaux partent-ils vraiment à la retraite aujourd’hui ?

Regardons de plus près à quel âge effectif les travailleurs de ces régimes spéciaux partent en retraite. Pour ce faire, direction les derniers bilans sociaux des diverses sociétés concernées. Ces registres très instructifs donnent un éclairage sur la répartition de leurs employés par catégories d’âges.

Ainsi, chez EDF, sur 63 000 collaborateurs enregistrés : seulement 1 % des « agents d’exécution », 1,5 % du « personnel de maitrise » et 3,5 % du « personnel d’encadrement » affichent un âge de 61 ans et plus.

Chez TotalEnergies, environ 8 % des employés sont âgés de 60 ans ou plus. L’entité France apprend néanmoins qu’un système de préretraite offre à la majorité des raffineurs la possibilité de partir jusqu’à 5 ans avant l’âge légal. À 57 ans donc.

À la RATP, sur 46 000 salariés recensés : 7 % d’entre eux ont 56 ans et plus. La catégorie de 60 ans et plus n’est même pas référencée. Questionnée plus précisément, l’entreprise informe que l’âge moyen de départ en retraite s’établit à 55,8 ans pour les conducteurs de RER et de métros, et à 56,1 ans pour les conducteurs de bus. Les personnels administratifs partent à 57,3 ans, et les cadres à moins de 60 ans.

À la SNCF, les informations publiques dévoilées par la société ne permettent pas de savoir quelle peut être la part des 60 ans et plus. En effet, le seuil des seniors est arrêté à 55 ans dans l’entreprise de chemins de fer. Ce qui est, en définitive, assez éloquent sur la question.

Nous sommes donc bien loin du départ à 64 ans défendu aujourd’hui par le Gouvernement Borne.

Report de l’âge de départ : les régimes spéciaux voient rouge

Si le projet de réforme des retraites 2023 est bien voté tel que l’Exécutif l’a conçu, la plupart des régimes spéciaux de retraite disparaîtront dans un avenir très proche. Ils seront absorbés par le régime général et bénéficieront donc de conditions retraite alignées sur celles de tous les Français du privé.

Les ex-régimes spéciaux seront ainsi bel et bien concernés par le report de 2 ans de l’âge légal de départ à la retraite, qui glissera de 62 ans actuellement à 64 ans. Pas étonnant de découvrir la grogne des affiliés, dans la mesure où ils partent aujourd’hui bien souvent en retraite à 57 ans et moins. Pour eux, le projet de réforme des retraites 2023 est un vrai coup de massue. Ils devraient donc œuvrer 7 ans de plus que ce qui est pratiqué actuellement.

La fonction publique : un cas à part

Certains régimes spéciaux devraient néanmoins être épargnés. Il s’agit des hypers spécifiques comme la Comédie française, les marins et l’Opéra de Paris. Les régimes autonomes des avocats et professions libérales seront aussi conservés.

Quant à la fonction publique, elle continuera à bénéficier des faveurs de l’Exécutif. Notamment sur le calcul de la pension qui restera focalisé sur les 6 derniers mois d’activité ou sur certaines spécificités qui seront accordées à des personnels particuliers. Ce sera le cas des agents de la fonction publique territoriale et hospitalière, des ouvriers d’Etat et des militaires de la fonction publique d’Etat. « Il ne sera pas demandé de travailler plus longtemps dans un métier exposé pour pouvoir bénéficier d’un départ anticipé » a indiqué le Gouvernement.

Ainsi, en catégorie « active », les périodes de service (17 ans ou 27 ans) et les âges permettant d’annuler la décote (à partir de 56 ans et 3 mois) ne seront pas modifiés pour partir plus tôt en retraite à taux plein. Il est à noter que les missions contractuelles découlant sur du fonctionnariat seront dorénavant considérées pour ouvrir droit à retraite anticipée.

En résumé

  • Par mesure d’équité, le Gouvernement Borne souhaite supprimer la majorité des régimes spéciaux de retraite ;
  • Entre départ en retraite anticipé et pension de retraite plus élevée, les régimes spéciaux bénéficient de droits retraite très attractifs par rapport aux salariés du privé ;
  • En règle générale, la grande majorité des affiliés aux régimes spéciaux partent avant 57 ans en retraite à taux plein ;
  • Avec la réforme des retraites 2023, les ex-régimes spéciaux devront travailler 7 ans de plus pour s’aligner avec le régime général ;
  • La fonction publique va bénéficier d’un traitement à part au sein de la réforme des retraites à venir.

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Emilie Gardes

Rédactrice spécialisée en Economie, Finance et Immobilier

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